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Photo du rédacteurThomas Patris de Breuil

Turquie : le jeu du chat et de la souris

Dernière mise à jour : 2 janv. 2021

Les passes d’armes s’enchaînent. Les provocations aussi. Pas une semaine ne passe sans que Recep Tayyip Erdogan ne cherche à affirmer la puissance turque. Intervention directe au haut- Karabakh, offensive de l’armée turque dans le nord de la Syrie, axe stratégique russo-turque en Libye et les dernières outrances d’un navire d’exploration turc en méditerranée orientale participent à cette volonté d’influence sur une partie du globe. Le retour de la grandeur ottomane est au centre des ambitions d’Erdogan.


Les différentes palettes stratégiques d’Erdogan


Entre l’Europe et la Turquie, l’ambiance n’est pas à l’apaisement. Récemment sanctionnée à minima par le club des 27 européens, la Turquie est présente sur tous les fronts. Erdogan donne le tempo et imprime sa marque. Son audace stratégique provoque des « mouvements d’humeur » au sein de l’Otan, institution dont elle est membre. Expression très diplomate pour dénoncer les provocations turques face à ses « alliés, rivaux » les plus puissants : Europe, Russie et Etats-Unis pour ne pas les citer.


Ankara agit en électron libre sans que personne ne réagisse vraiment. Dans le Haut Karabakh, Poutine a laissé faire à condition que cela ne dérape pas trop. L’Europe réagit mollement après les provocations dans les eaux méditerranéennes. Les divisions internes, l’immigration et son déclin font le jeu d’Erdogan. Les Etats-Unis sont en pleine transition politique mais l’administration Biden est très attendue sur ce sujet. Erdogan ménage la Chine notamment aux sujets des Ouighours. En fonction de ses palettes d’intervention, le sultan turc se place comme un interlocuteur fort.


Se placer comme leader du monde musulman


La Turquie veut prendre la tête du monde musulman. Rôle occupé un temps par Bagdad, Damas, Beyrouth ou encore l’Empire Ottoman à une autre époque. Il y a désormais une place à prendre. L’Irak est faible, le Liban se défait, la Syrie tombe… Le sultan islamo-conservateur turque l’a bien compris. Sa logique de confrontation prend alors tout son sens. Pour devenir le leader, il lui faut un ennemi identifié et clair, « un ennemi de l’islam » comme il le clame souvent, la France est le candidat idéal.

Débat sur les caricatures, projet de loi sur le séparatisme, principe de laïcité. Contexte idéal pour dégainer les joutes verbales successives à l’encontre d’Emmanuel Macron et de la société française. Pas une semaine ne passe sans que la Turquie s’en prenne à la France « il faut se débarrasser du problème Macron ». La stratégie de faire passer la France pour un pays islamophobe bat son plein « La France est un pays gangréné par le racisme ».

Laisser croire que la France mène une campagne de haine contre le monde musulman est aussi une façon pour Erdogan de fédérer autour de lui et de déstabiliser le couple franco-allemand. Des liens très forts unissent le peuple allemand et turc. Première diaspora avec plus de 2,5 millions de turcs en Allemagne.


Un jeu dangereux


A force d’outrance et de provocation, Erdogan s’expose politiquement. L’OTAN n’a pas apprécié quand les turcs ont acheté de l’armement russe extrêmement pointu de défense aérienne : le S400. Les Américains ont refusé quelques semaines après d’intégrer les turcs au programme F35 (avions de combat furtif). Les rapports de forces sont le fil continu de la diplomatie turque. Deuxième armée de L’OTAN, la Turquie développe sa base industrielle et technologique de défense (BITD) et développe une capacité militaire moins dépendante de l’extérieur.


Sanctionner la Turquie ? La logique de sanction est à double tranchant. Elle peut aussi bien resserrer les liens de la population autour de son leader que les affaiblir. L’Europe a besoin de la Turquie et réciproquement.


Erdogan veut être traité d’égal à égal et il le fait comprendre. Avoir fait miroiter l’entrée de la Turquie dans l’Union européenne pour mieux leur mettre un stop a provoqué un sentiment d’humiliation nationale toujours prégnant. Il serait de bon ton de ne pas s’arrêter aux outrances de la Turquie et trouver un moyen de ne pas les ostraciser. Et pas que pour leur position géographique…

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